Face à l'urgence sociétale que représente la douleur chronique, avec ses répercussions majeures tant sur l'individu que sur la collectivité, cet article se penche sur la nécessité d'une prise en charge holistique et personnalisée. Alors que les approches traditionnelles centrées sur le traitement médicamenteux sont souvent inefficaces et sources de dépendance, il souligne l'importance d'une compréhension plus profonde du vécu du patient.
Juste considération de la douleur chronique et amélioration de sa prise en charge
La juste considération de la douleur chronique et l’amélioration de sa prise en charge sont une priorité sociétale tant par sa fréquence que par ses conséquences graves sur la santé et sur la vie individuelle et collective. C’est même, dans certains cas, une véritable urgence compte tenu du risque suicidaire non négligeable. Aux Etats Unis on estime que près de 11,2% des personnes souffrent de douleurs chroniques avec un impact important sur le handicap, le taux d’hospitalisation et le chômage. De nombreux patients nord-américains se voient prescrire des opioïdes et ce malgré leur peu d’efficacité, les effets secondaires et la dépendance qu’ils entraînent. (Hassan M 2018)
La douleur qui perdure comme la plupart des maladies chroniques est un modèle complexe multifactoriel. Le traitement médicamenteux ne constitue pas la seule clé thérapeutique et la majorité des patients qui consultent à l’hôpital n’ont pas été satisfaits par leur prise en charge initiale. Ils sont à la recherche d’autres alternatives pour se sentir mieux.
Depuis Platon en passant par Descartes, la culture occidentale a constamment véhiculé une dichotomie corps-esprit. Ceci a conduit à une attitude objectivante et rationnelle du corps parfois réduit à un objet que la médecine tente de réparer du mieux qu’elle peut. En conséquence, les symptômes corporels sont souvent expliqués comme de purs événements biologiques. Il nous paraît urgent d’aider la personne à retrouver le sens global de son être, à de multiples niveaux qui interagissent entre eux : biologiques, affectifs, cognitifs, relationnels, environnementaux…
L’offre de soins, dans l’ensemble des maladies chroniques, telles que la douleur, doit englober différentes sphères physiques, psychologiques, personnelles et interpersonnelles du patient, pour l’amener à mieux comprendre et accepter la maladie qui le concerne actuellement.
Ainsi, une approche dite intégrative est adaptée à chaque patient avec plusieurs pratiques thérapeutiques et une coordination des différents acteurs impliqués afin de répondre au mieux à la problématique spécifique de chaque personne.
Nous considérons que le patient est bien l’acteur principal de sa santé. Le rôle du thérapeute est de favoriser et de maintenir une collaboration active et constante du patient qui devient dans une certaine mesure co créateur et partenaire du soin. Carl Roger a souligné l’importance de cette relation d’aide visant à favoriser chez l’autre, le développement, la maturité, avec une plus grande flexibilité dans son parcours de vie. Il prône une pédagogie non directive impliquant le respect de l’autonomie et la confiance dans les capacités du patient. Il s’agit pour le thérapeute de se centrer totalement sur la personne qui le consulte en étant présent et disponible pour elle. L’écoute active favorise l’ouverture d’esprit et le partage dans une intentionnalité bienveillante visant à la personne à se sentir mieux malgré sa douleur. Les principales valeurs fondamentales prônées par Rogers sont le respect, l’empathie, la bienveillance, l’acceptation, la chaleur humaine, l’honnêteté, la simplicité et la congruence. L'originalité de la thérapie de Rogers réside dans son orientation affective plus qu'intellectuelle, favorisée par l'échange entre le « client » et son thérapeute. L’être humain a ainsi en lui d’immenses ressources, qui peuvent être exploitées pour peu qu’il se sente en confiance et grâce aux capacités psychologiques facilitatrices du thérapeute. Cette approche centrée sur la personne vise à développer le potentiel d’évolution et d’épanouissement.
Il existe cependant 2 limites importantes pour pouvoir aider efficacement ces patients :
- Le patient qui consulte au centre antidouleur est-il client d’un changement ?
- Accepte-t-il de participer et jusqu’où est-il prêt à aller pour changer ? Ainsi par exemple on peut considérer qu’il faut souffrir suffisamment pour être prêt à faire un 180° lors de certaines tachesthérapeutiques
Dans la lignée de C. Rogers, nous considérons dans notre pratique que c’est le patient qui décide ce qu’il a envie de changer en priorité et de ce fait nous nous efforçons de proposer une thérapie sur mesure pour chacun. Ainsi nous abordons la thérapie comme si nous allions à la rencontre de la personne pour une découverte sans a priori de la problématique qu’elle souhaite aborder ici et maintenant. L’objectif de notre intervention vise avant tout à diminuer la souffrance quelle que soit son origine et à améliorer les aspects fonctionnels, relationnels et psychosociaux de la vie du patient.
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l’approche interactionnelle systémique : plaidoyer pour montrer sa pertinence
L’approche interactionnelle stratégique et systémique nous semble particulièrement appropriée pour les patients souffrant de douleur chronique. Nous constatons que, quelles que soient les plaintes symptomatiques exprimées par les patients, le contexte de vie et les expériences du passé jouent un rôle considérable aussi bien sûr la douleur physique que sur la souffrance morale qu’ils expriment.
Il nous arrive parfois d’être provocateur en proposant que la douleur pourrait jouer un rôle important de signal d’alerte pour mettre en place des changements significatifs dans sa vie. Qu’en pensent-t-ils ? Quels seraient alors ces changements ? Nous constatons que certains sont tout d’abord étonnés puis intéressés par cette proposition qui prend en quelque sorte le contrepied d’une première position de rejet et d’éviction. Graham Hadley & Matthew B. Novitch (1989) proposent l’idée de mettre en exergue une douleur qui fait sens pour la personne. Ce nouveau regard sur la douleur, permet de prendre conscience des tentatives de solutions inopérantes mises en place jusqu’à maintenant pour tenter de lui échapper : déni, éviction, limitations fonctionnelles et cognitives et rétrécissement global du champ de pensée….
Nous incitons alors la personne à se questionner sur un principe d’utilité pour l’aider à choisir ce qui compte vraiment pour elle et lui permettre d’envisager certains changements « Est-ce que cette pensée ou ce comportement m’aide à aller vers ce que je souhaite pour moi dans ma vie ou bien au contraire m’empêche- t-il d’avancer ? ».
Notre expérience au terme de 2 ans au centre antidouleur s’inscrit dans un plaidoyer pour un développement rapide du champ des psychothérapies dans les centres antidouleurs à l’hôpital. Le corps humain, l’intellect et l’inconscient constituent un système performant et complexe qui interagit sans cesse avec le monde extérieur dans un contexte relationnel permanent. Il est aisé d’expliquer au patient que s’il met en place des changements dans sa vie c’est tout le système dans lequel il évolue qui va changer et en particulier ses relations avec les autres et aussi avec lui-même.
Il n’existe pas à notre connaissance de guidelines ou de protocoles prédéfinis pour aborder le patient qui souffre de douleurs chroniques en thérapie brève systémique. Très peu de données de la littérature sont disponibles sur ce sujet précis alors qu’il y a de nombreuses publications concernant la prise en charge de la douleur chronique par l’hypnose, la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT) ou la méditation en pleine conscience. Pour les patients qui souhaitent avant tout l’amélioration du soulagement de leur douleur corporelle : nous proposons en priorité la pratique régulière de la pleine présence ou l’apprentissage de l’autohypnose en première intention. Lorsqu’une souffrance particulière est exprimée par le patient et que c’est un objectif thérapeutique prioritaire pour lui, nous utiliserons les mêmes outils que chez les personnes qui consultent un thérapeute en dehors d’un centre antidouleur en nous focalisant uniquement sur la plainte exprimée par le patient. Nous constatons très fréquemment que ce n’est pas la plainte algique qui est au premier plan mais plutôt l’expression d’une solitude, de blessures d’abandon, de problèmes d’assertivité ou d’évènements traumatiques qui affectent la vie de la personne.
Le modèle stratégique systémique est tout à fait adapté et donne des outils pratiques et relativement simples à utiliser pour aider le patient à se débarrasser d’un problème qui le gêne dans sa vie ici et maintenant ; Il s’agit d’un travail de mode de survie pour l’aider à passer d’un mode « survie » à un mode « vie », dans une relation plus apaisée avec ses symptômes. Il permet au patient d’apprendre à déconstruire sa réalité qui l’enferme pour sortir d’une douleur vécue comme identitaire et se créer une autre réalité qui l'amène à penser et à agir différemment.
L’hypnose conversationnelle et l’utilisation de métaphores accompagnent et font partie à mon sens de la thérapie systémique. De même certains outils de LACT tels qu’un travail spécifique sur les valeurs ou l’apprentissage d’une défusion avec des pensées récurrentes toxiques peuvent être très également très utiles. Dans notre expérience, ces différentes thérapies peuvent être utilisées conjointement lors d'une même séance ou en alternance au fil du temps au fur et à mesure de l’évolution du processus thérapeutique.
Le risque pour le médecin ou le thérapeute qui consulte dans un centre antidouleur est de s’enfermer dans une sorte de lassitude et même d’une compassion qui s’effiloche dans le temps à mesure des plaintes itératives des patients. C’est pourquoi il est intéressant d’envisager une prise en charge multifactorielle et de pouvoir bénéficier d’un arsenal thérapeutique diversifié pour proposer à chacun une prise en charge sur mesure. Cette diversification des pratiques est enrichissante car elle stimule la créativité du praticien et même du patient !
Notre expérience depuis 2 ans au centre antidouleur plaide pour la fin d’un dualisme « corps- esprit » et pour une médecine intégrative et systémique qui prend en considération la complexité de la personne et le contexte relationnel dans lequel elle évolue dans une perspective systémique et en constante évolution.
Où se former à l’hypnose ?
LACT propose plusieurs parcours de formations web certifiantes en direct avec 50 formateurs internationaux.