Un extrait de la web-conférence:
" Intimité, couple et famille en temps de confinement"
avec le Dr. Robert Neuburger
Le confinement a suscité l’augmentation importante des violences dans les familles. Dans cette situation nouvelle, on va trouver des difficultés mineures et parfois des violences des enfants entre eux, des ados contre les parents et de la violence dans les couples.
Dans les questionnements proposés, il est intéressant d’utiliser le concept de crise. C’est un changement important entrainant des modifications, de la créativité à la sortie de ce confinement en espérant qu’il soit le plus court possible.
Le Dr. Robert Neuburger a choisi de partir de l’angle de l’intimité. Ce qui manque le plus, c’est l’intimité et à tout niveau. Je parle de l’intimité dont on peut bénéficier en temps normal : un espace, le travail, le sport et les autres relations…
Une définition d'intimité:
« L’intimité indique une clôture, une frontière à ne pas dépasser. Elle est réservée à soi-même ou à certains, qui font partie des proches. Les autres, les étrangers, en sont exclus, à moins d’y être conviés.
Notre société autorise trois territoires intimes : l’intimité personnelle, l’intimité du couple et l’intimité familiale. Elle assure leur protection : il existe un droit de vie privée et la loi sanctionne les effractions par la presse, par tout organisme social ou même par tout particulier, de la vie privée des individus, des couples et des familles, par exemple la divulgation de certains documents, photographies, secrets sans autorisation. La société considère que chacun a le droit de mener l’existence qui lui convient dans l’intimité de sa vie, de son couple et de sa famille pour autant qu’ils ne transgressent pas les lois communes. Nous pouvons définir l’intimité comme la privacy anglo-saxonne, espace qui est sous sa responsabilité, que nous gérons selon des principes qui nous appartiennent. Nous n’avons pas de compte à rendre, contrairement à d’autres groupes d’appartenances : il n’y a pas de règlement intérieur, pas d’assemblée générale, pas de rapport annuel, pas de tutelle, libre à nous ouvrir ou de fermer ces espaces selon notre volonté et à qui nous désirons. Ce sont aussi des zones franches qui bénéficient d’une certaine forme extraterritorialité juridique : le vol entre époux ou entre enfants et parents n’est pas punissable, de même que l’on ne peut imposer à un conjoint de témoigner contre l’autre. Dans ce sens, l’intime est le légalement caché.
L’intime existe également dans les groupes d’amis, dans les relations fraternelles ou autres, mais, à la différence des espaces « officiels », reconnus par le droit, ceux-ci ne bénéficient d’aucune reconnaissance, d’aucune légitimité…
Chaque territoire d’intimité - l’individu, le couple, la famille – comprend trois composants : l’espace physique, l’espace psychique et le domaine de la compétence, autrement dit, l’être, la pensée et l’agir. » (Référence au Livre sur « Les territoires de l’intime : l’individu, le couple, la famille »)
L’intimité est un droit de disposer d’un territoire dont on est le gérant, c’est privé. Disposer d’un territoire d’intimité, c’est le sentiment d’exister, une consistance, le sentiment d’exister dans un couple, dans un groupe. Cette intimité, elle contient mais elle est, elle-même, complexe dans sa structure, avec des éléments physiques (corps, proxémie, temps), avec des éléments psychiques (rêves pensées, convictions, toutes ces choses privées) et un domaine de compétence (qui fait partie du domaine d’intimité) que nous n’aimons pas remettre en question. Cela exige un respect.
Intimité familiale :
C’est compliqué. La famille est devenue un monde d’une complexité importante. Avant, il y avait un chef de famille et tout le monde derrière. Maintenant, la notion de famille et d’intimité familiale n’est pas valorisée. Il y a une demande d’exister comme le couple distinct de la famille, un peu comme un kit démontable aujourd’hui. Il y a le groupe couple qui demande un territoire de l’intimité, une fratrie qui revendique son territoire et chaque être demande un territoire d’intimité personnel qui doit être respecté. Il y a tous ces territoires d’intimité qui revendiquent un espace.
Sans confinement, c’est déjà complexe alors avec le confinement la complexité augmente. Chacun de ses éléments comportent des éléments spécifiques. Et cela est très intéressant. Il est fabriqué. Chacun du couple abandonne de son intimité personnelle pour le donner au couple. L’organe sexuel appartient au couple, dans l’intimité du couple. Il y a aussi le corps, le vêtement…est ce que l’argent appartient au couple ou chacun le gère ? Beaucoup de questions sur ce qui se composera, dans le couple. Ce qui va donner un trop pour le couple ou un pas assez pour l’individu. On donne de son corps, de ses croyances, et jusqu’à partager des mythes idéologiques, des normes. Il y a là une mise en commun des compétences.
La fratrie va revendiquer la même chose, des jeux privés, un territoire, des éléments psychiques, les secrets, ce qui est partagé comme l’ordinateur, par exemple. Chacun va revendiquer un espace propre, un droit à avoir des idées, des croyances, savoir. Chacun a le droit de développer ses compétences sportives et religieuses.
La famille revendique un territoire, comme la maison, les normes portées dans la famille, la politique, les idéologies, compétences, apprentissages.
On va trouver en compétition 4 mondes d’éléments d’intimité qui demandent à exister.
Chacun de ses mondes va être délimité. Il y a des limites mais ce ne sont pas des frontières. C’est une membrane semi-perméable, avec des sorties et des entrées. Il y a une face interne qui tient à conserver des éléments et il y a un tri. De même, il y a des tris sur ce qui entrent et sort comme les croyances, les compétences, les secrets de famille.
Pour que le territoire de l’intimité soit reconnu, il faut qu’il y ait un respect de certaines normes extérieures sinon le groupe va se faire « attaquer ». Lors de viols ou d’abus dans le groupe, il sera « attaqué » par la société ou la famille.
Il existe une complexité de la situation à partir du moment où il y a ce confinement, qui non seulement rassemble mais aussi interdit que d’autres rentrent sauf par les moyens modernes, comme les chats ou outils informatiques comme Zoom ou autres. Nous vivons un confinement qui est extraordinaire. On n’a jamais connu ça. C’est une période invraisemblable, totalement nouvelle. [...]
Notes C. Sinet Portelli