L’intervention systémique et stratégique est dirigée vers le changement. Pour créer les conditions du changement, le thérapeute systémique utilise différentes techniques comme le recadrage, le questionnement et les questions avec illusion d’alternative, des questions relatives à la définition du problème, des reformulations, des métaphores et un langage évocateur, des prescriptions de tâche
Le recadrage
Au travers des actions de recadrage, notre objectif est de faire bouger la perception du patient pour ouvrir de nouvelles perspectives et l’amener vers un changement. Au fil des questionnements et des reformulations, la personne visualise progressivement comment fonctionne son problème et les tentatives de solutions redondantes mises en œuvre qui l’alimentent et parfois même, l’aggravent. Le recadrage lui permet de percevoir sa situation autrement et de se préparer à y réagir de manière plus adaptée via les prescriptions de tâche. Pour qu’un recadrage soit efficace, il est indispensable d’avoir pris le temps de comprendre et décoder la vision du monde du patient. Sans cela, le thérapeute risque de tomber dans l’interprétation et générer de la résistance chez la personne qui se traduira au mieux par une incompréhension et au pire par un blocage ou une opposition radicale.
Le questionnement et les questions avec illusion d’alternative
En répondant à des questions qui l’amènent à adopter de nouveaux points de vue, le patient découvre de nouvelles solutions efficaces qui lui avaient été invisibles jusque-là. Ces nouvelles perspectives lui sont suggérées à travers l’orientation du questionnement. Les questions avec illusion d’alternatives sont des questions fermées qui conduisent à choisir entre deux possibilités. Ce sont des questions qui circonscrivent le problème. Elles se focalisent sur les aspects de perception du patient par rapport à son problème, sur sa façon d’interagir avec la réalité problématique, ses tentatives de solution et la vision qui les alimente. La séquence du questionnement agit comme un entonnoir et amène la personne à ressentir l’exigence du changement.
Exemples de questions relatives à la définition du problème
QUI ? « Seul ou avec d’autres ? » Si avec d’autres : « Avec tout le monde ou avec des personnes particulières ? »
QUOI ? « Tel comportement ou son contraire ? »
QUAND ? « Toujours ou parfois ? » « Dans des circonstances prévisibles ou imprévisibles ? »
OÙ ? « Partout ou dans certains endroits ? » Si dans certains endroits : « À domicile ou au travail ? »
COMMENT ? « Spontanément ou déclenché par quelque chose ? » « Vous avez tendance à boire seul ou en compagnie ? »
Exemples de questions relatives au fonctionnement du problème
Une fois que la personne identifie comment son problème fonctionne, le thérapeute peut alors la questionner pour identifier les TSR et leur impact sur le fonctionnement du problème : « Quand vous êtes face à ce problème, vous avez tendance à affronter ou éviter ? » « Vous cachez ou vous laissez voir ? » « Vous en parlez à votre entourage ou vous gardez pour vous ? » « Et lorsque vous faites cela, les choses changent ou elles restent pareilles ?» « Et après avoir réagi comme cela, vous vous sentez mieux ou moins bien ? » « Quand vous faites cela, vous diriez que votre situation a tendance à s’améliorer ou bien qu’elle s’aggrave ? » Au travers du questionnement, la personne commence à douter de l’efficacité de ce qu’elle a mis en œuvre jusqu’à présent pour résoudre son problème et à entrevoir d’autres alternatives plus fonctionnelles.
Les reformulations
Les reformulations vont avoir plusieurs objectifs :
- Comprendre ce que dit la personne, la rejoindre dans sa vision du monde et éviter d’interpréter. La fréquence des reformulations et l’utilisation de formules telles que : « Si j’ai bien compris... », « Corrigez-moi si je me trompe... », permettent au thérapeute de s’assurer qu’il capte correctement les informations qui lui sont délivrées sans risquer de dégrader la relation en cas d’incompréhension.
- Donner une vision interactionnelle du fonctionnement du problème et amener le patient à « ressentir » la nécessité de changer ce qui alimente son problème.
- Changer la vision du monde de la personne : en reformulant régulièrement les réponses apportées par le patient aux questions avec illusion d'alternative, le thérapeute recadre en douceur sa perception et sa réaction.
- Introduire les prescriptions thérapeutiques et mobiliser la personne. Il s’agit là de résumer tout ce qui a été dit et « découvert » à propos du problème (notamment le mode de persistance et les TSR). Avec cette tactique, la personne n’aura pas l’impression de devoir s’aventurer dans l’inconnu lorsqu’elle accomplira les tâches que le thérapeute lui aura prescrites.
Les métaphores et le langage évocateur
« Pour convaincre l’esprit, il est nécessaire de toucher et de prédisposer le cœur » B. Pascal
Le recadrage est également réalisé par l’intégration, dans les reformulations, d’images, d’analogies, de citations ou de métaphores liées au problème. En utilisant cette forme de communication, le thérapeute s’adresse à l’imaginaire de la personne (à son inconscient) plutôt qu’à son esprit logique (son conscient). Ainsi, au travers de l’utilisation d’images auxquelles elle s’identifie, le thérapeute l’amène à « ressentir différemment plutôt qu’à penser différemment » (Wittezaele, Nardone, 2016, p 177) afin de :
- Rendre aversif le recours aux tentatives de solutions redondantes,
- Mobiliser la personne pour adopter de nouveaux comportements. Pour rendre ce type de communication efficace, la formulation doit être adaptée au style de communication et aux caractéristiques personnelles de la personne. Il s’agit notamment d’utiliser son vocabulaire et des images en résonance avec son contexte, ses centres d’intérêt, etc.,
- D’intervenir au bon moment pour provoquer l’effet escompté.
Les prescriptions de tâche
« Si tu veux voir, apprends à agir. » H. Von Foerster
Tout comme les techniques précédemment décrites, les prescriptions thérapeutiques visent également à impacter le SPR du patient. Elles permettent à la personne de faire l’expérience d’une nouvelle interaction où elle n’utilise plus ses TSR et où le problème diminue. Proposées en fin de séance, elles découlent des recadrages, reformulations et autres interventions stratégiques qui préparent la personne à accepter naturellement une expérimentation qui se situe à 180° de ce qu’elle faisait jusqu’à présent.
- Les tâches d’observation permettent au patient de prendre du recul sur sa situation problématique et de se concentrer sur certains aspects spécifiques. C’est également un moyen pour lui et le thérapeute d’acquérir une meilleure connaissance du fonctionnement du problème et d’identifier certaines TSR (ex : « le carnet de bord »).
- Lorsqu’elles sont « orientées solution » les tâches d’imagination préparent au passage à l’action et renforcent la motivation de la personne pour changer. (ex : « la question miracle ») Elles sont utilisées également pour réguler l’intensité de la peur, lorsqu’elle est à la source du blocage (ex : « le fantasme du pire »), ou bien de façon paradoxale (ex : « Comment aggraver ? »).
- Les tâches d’expérimentation amènent le patient à mettre en œuvre des comportements à l’opposé de leurs TSR. La logique des tentatives de solution sert de canevas au thérapeute pour définir la stratégie à mettre en place tout au long de l’accompagnement et pour l’ajuster au fil des séances et des retours de tâches grâce à un processus autocorrectif.
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